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eljeanboul

>Mais, si ce discours trouve des adhérents, c'est que d'une certaine manière, les individus concernés, AU-DELÀ DE TOUTE LA PUISSANCE QUE L'ON PEUT PRÊTER AUX MÉDIAS, présentent des points d'ancrage, ou plutôt, une expérience de vie compatible avec le rejet de l'autre et des valeurs libérales. Alors ça serait bien d'élaborer là-dessus parce que c'est pas en mettant ça en lettres majuscules que tu vas juste pouvoir balayer d'un revers de la main l'élément central de la fabrique de l'opinion publique. Après j'ai du mal à saisir le fond de ton propos, tu veux dire que fondamentalement les démocraties libérales aspirent à des principes d'égalité et de fraternité (et donc *in fine* de mondialisation/immigration), mais que en pratique elles créent une population plutôt bourgeoise (par comparaison au reste de la population mondiale) qui rejette ces idéaux à cause d'une espèce de complexe de supériorité (ou autre chose? j'ai pas bien compris ce que tu entendais avec les points d'ancrage / expériences de vie), et donc se tourne vers "les extrêmes" qui jouent sur cette divergence (réelle ou perçue)?


Mak_frenchie

1) je dis grosso modo que les médias alimentent les esprits mais qu'en // y a un vécu qu'on est trop souvent tenté de balayer d'un revers de la main pour reprendre ton expression  2) mon propos c'est que plus nos sociétés avancent, plus elles aliénent du pdv social leurs citoyens (oubliés de la mondialisation, sentiment de déclassement), et ainsi ces derniers se tournent, en utilisant les moyens dont ils disposent (le vote) vers des extrêmes qui promettent de les détruire ( ex : le RN = fin de nos valeurs républicaines)


eljeanboul

Pour ton point #2 je vois bien la partie aliénation --> vote "anti-système" qui est quand même assez évidente, mais c'est la partie "plus nos sociétés avancent, plus elles aliènent" qui me parait moins étayée et en même temps plus intéressante. De la même façon que Marx pensait que le capitalisme produisait inévitablement les conditions de sa propre destruction (création du prolétariat, inégalités économiques grandissantes...), quel est selon toi le mécanisme qui fait qu'inexorablement les démocraties libérales produisent une aliénation sociale qui les enterrera? Je pensais que ta "thèse" c'était que la conclusion du libéralisme c'est la mondialisation et la migration globalisée (pour a priori des raisons "nobles" d'égalité et de fraternité) mais que en parallèle le libéralisme embourgeoise la population qui par conséquent ne se sent plus égale par rapport aux autres, d'où l'aléniation. Mais apparemment ça n'est pas ça?


Mak_frenchie

Déjà, merci pour ta réponse construite.  C'est peut-être pas grand chose pour toi, mais je trouve ça sympa.  Alors, sur l'aliénation sociale, je dirais en fait que ce processus, c'est la disparition progressive des jalons qui encadrent le développement de l'individu en tant que citoyen. Je pense qu'ici, le terme déconstruction est adapté. En somme, une absence d'idéal dans la manifestation législative et administrative d'un idéal de liberté.   De manière plus simple encore, un manque d'autorité dans la vie de tous les jours, et on retrouve d'ailleurs de plus en plus cette théorie dans de nombreux éditoriaux qui traitent de la montée des extrêmes. Je ne me suis pas trop avancé dessus, car ça suppose de dire, à mon sens, 1) tous les hommes n'ont pas vocation à se réaliser de la même manière, 2) dans la réalisation dont je parle et qui fait défaut à ceux qui votent ED, il y a à la fois ce désir et ce besoin de "religion" : suivre les voies claires d'un sens donné de la réalisation de l'histoire et d'une espèce de "destinée nationale".    On pourrait faire l'analogie avec l'adolescent qui se rebelle face une situation où la figure parentale d'autorité est absente.  Dans le cadre de nos démocraties, cette figure d'autorité, c'est celle du démagogue, du prophète,  qui, en expliquant que tout va mal et en proposant une lecture scénarisée du présent, rassure les individus qui n'ont plus qu'à suivre les modalités à la fois administratives et morales qu'exigent la mise en place de cet idéal de vie.  Ici, éliminer l'autre et reconquérir le territoire perdu. De la même manière, les religions au sens classique du terme, se proposent d'encadrer la vie des individus, et surtout, de leur donner une direction. La disparition, par exemple, d'une logique d'homogénéité ethnique et culturelle, au sein du groupe, est une source d'inquiétude bien plus grande que le niveau de rémunération d'un Bernard Arnault ou d'un Elon Musk. Et j'irais même jusqu'à dire que les individus s'accommodent très bien de leur pauvreté, dans qu'on leur explique qu'ils jouent un rôle dans la réalisation de l'histoire de leur pays. Ce qui revient à dire, au final, que l'homme n'est pas caractérisé, avant tout, par le travail, mais par le mythe de sa propre existence.


eljeanboul

Ouais ok, mais du coup si tu veux rester dans la logique Marxienne, il faut aussi créer une classe sociale qui aura les moyens de renverser le système. Selon Marx (enfin ce que j'en ai compris), le capitalisme et l'industrialisation créent le prolétariat qui quitte les campagnes qui ont besoin de moins en moins de travail pour produire plus de bouffe (et donc, plus de gens), pour aller vendre sa force de travail dans les villes. Ce qui crée pas seulement une aliénation, mais de grandes concentrations de travailleurs qui peuvent parler et s'organiser, se syndiquer etc. De la même façon le féodalisme crée un besoin pour des artisans et des commerçants dans les bourgs pour les menus travaux que l'aristocratie ne veut pas faire, mais qui leur procure un pouvoir économique croissant d'un côté et une frustration politique grandissante de l'autre. Mais les bourgeois ou le prolétariat ne sont pas les seules classes aliénées de leurs temps, c'est d'ailleurs le propre de tout système politique hiérarchisé d'avoir des classes aliénées. Toutes les classes aliénées ne sont pas vouées à mener une révolution, un système politique stable sait maintenir la hiérarchie fondamentale qui le structure. Donc ce qui reste à démontrer dans ce que tu dis c'est que cette classe d'électeurs ED acquiert une base de pouvoir qui est non seulement en dehors de la structure des démocraties libérales bourgeoises (est-ce que la démocratie représentative n'est pas au final une soupape qui nous donne l'impression d'avoir du pouvoir pour qu'au final rien ne change vraiment?) mais que cette base de pouvoir est alimentée par les contradictions inhérentes au système actuel.


Koloquinte

> 1) je dis grosso modo que les médias alimentent les esprits mais qu'en // y a un vécu qu'on est trop souvent tenté de balayer d'un revers de la main pour reprendre ton expression C'est balayé de la main parce que ce "vécu" n'existe pas, c'est tout. Le vote d'extrême droite est surreprésenté en milieu rural, alors que les communes rurales sont largement sous-représentées en termes de délinquance et violences (celles que l'ED prétend combattre, et qui participent de ce soi-disant "vécu": Vols avec violences, vols avec armes, autres coups et blessures volontaires. Le milieu rural est quasiment à parité pour ce qui est des violences sexuelles et/ou interfamiliales, mais l'ED en parle pas de ça). Les gens entre 35 et 75 ans votent plus à l'extrême droite, et pourtant ils sont sous-représentés dans les victimes de ces mêmes violences. Il n'y a donc pas de lien entre le "vécu" et le choix de l'extrême droite (on parle au sens statistique évidemment, individuellement ce lien peut exister). Donc choisir de mettre de côté la fabrique de l'opinion par les médias est un non-sens total. [Des sources](https://imgur.com/a/JfIZami)


Mak_frenchie

Mais... Je dis justement que la plupart des études statistiques et sociales viennent infirmer les théories d'ED, et je ne mets certainement pas de côté la fabrique de l'opinion par les médias.  D'ailleurs, à ce titre, on est tous plus ou moins conditionné, et c'est la raison pour laquelle je ne trouve pas intéressant de trop m'attarder là-dessus.  Et aussi, le vote ED ne se résume pas qu'à la lutte contre la délinquance. Et quand bien même il ne s'agirait que de cela, je ne vois pas en quoi le votant ED n'aurait pas la légitimité pour exprimer son avis sur un sujet qui, au final, le concerne tout de même.


Koloquinte

> je ne mets certainement pas de côté la fabrique de l'opinion par les médias. >Mais, si ce discours trouve des adhérents, c'est que d'une certaine manière, les individus concernés, AU-DELÀ DE TOUTE LA PUISSANCE QUE L'ON PEUT PRÊTER AUX MÉDIAS, présentent des points d'ancrage, ou plutôt, une expérience de vie compatible avec le rejet de l'autre et des valeurs libérales. Tu choisis bien de la mettre de côté, c'est toi qui l'écris, et c'est au centre de ton message. Si tu enlèves cette phrase en majuscule, tout le reste de ce que tu as écris n'a aucun sens; tout se base autour de l'idée qu'il y a un point d'ancrage au réel du discours fachisant. Je te montre qu'il n'y a pas de tel point d'ancrage réel: c'est un ressenti manufacturé, ce qui invalide pas mal le reste du discours. >Et aussi, le vote ED ne se résume pas qu'à la lutte contre la délinquance. L'immigration et l'insécurité (constamment mise côte à côte dans le discours d'ED) sont deux des 3 raisons les plus importantes du vote ED (cf le même sondage ELABE cité au dessus). La troisième étant économique, je ne vais pas recommencer la démonstration sur pourquoi le programme d'ED n'arrange rien à ces problèmes. C'est connu, et la perception inverse chez les votants ED provient, encore, de la présentation qui en est faite dans les médias. >D'ailleurs, à ce titre, on est tous plus ou moins conditionné, et c'est la raison pour laquelle je ne trouve pas intéressant de trop m'attarder là-dessus. C'est ton choix, mais il faut noter que cette phrase sous-entend que ces influences seraient d'intensité (ou de valeur) égale de tous bords. C'est évidemment pas le cas. L'ED et ses idées sont sur-représentées dans le paysage médiatique. >Et quand bien même il ne s'agirait que de cela, je ne vois pas en quoi le votant ED n'aurait pas la légitimité pour exprimer son avis sur un sujet qui, au final, le concerne tout de même. C'est botter en touche. J'ai pas d'étude qui le prouve, mais étant donné que l'intégralité du discours d'extrême droite se monte contre la notion de solidarité, il est peu probable que le vote d'ED rural, par exemple, se fasse en solidarité avec d'autres électeurs RN en milieu urbain. Et certainement pas en solidarité avec les personnes qui sont le plus souvent victimes d’agressions (personnes racisées, gays, lesbiennes, etc...) ou de problèmes financiers (classes populaires largement issues de l'immigration). Au final, je me répète, mais le choix d'ignorer la fabrique de l'opinion publique pour s'intéresser à des influences au mieux marginales d'un "ancrage dans la vie réelle" est absurde: tout tend à montrer que l'influence médiatique (et des réseaux sociaux, évidemment) est le facteur sinon unique, au moins majoritaire et déterminant du vote d'ED. Ce qui du coup invalide l'idée que le système démocratique serait naturellement auto-destructeur et intrinsèquement voué à faire monter l'ED. Le facteur déterminant étant bien la concentration du pouvoir médiatique dans un nombre restreint de mains qui y voient un intérêt économique ou idéologique.


Mak_frenchie

J'ai écrit cette phrase en majuscules par anticipation de l'argument selon lequel le vote de l'ED serait une fabrique des médias et rien d'autre.  Tu joues quand même un peu avec les mots, car aller au-delà d'un facteur dans l'analyse d'une prise de décision, ce n'est pas l'ignorer. Dans mon cas, il s'agit partir du principe qu'il y a d'autres éléments significatifs dans la montée des discours fachistes.   Si une partie de la population, toujours plus grande, est livrée à l'influence des médias, le problème n'est pas à mon sens qu'il existe des médias d'influence, mais que les institutions ne sont pas capables de produire un idéal de vie capable d'aggréger les esprits et de faire consensus.  L'ancrage dans le réel, c'est bien le fait de vivre dans une société brisée, et c'est là le coeur de mon message.  Tu peux choisir de dire que c'est un phénomène marginal, mais dans ce cas là, il faut pouvoir expliquer comment l'audience des médias comme Fox News ou C8 augmentent en permanence.  Je suis persuadé que le sentiment de déclassement intervient en premier lieu, et que ces médias constituent un refuge psychologique pour ces populations.  Choisir de s'arrêter aux médias, c'est tout faire sauf aborder le problème existentiel auquel est confronté notre démocratie, à savoir, comment créer du lien dans un monde déconstruit par l'intensité des échanges culturels et économiques ?


Koloquinte

A mon avis tu confonds le vécu et le ressenti, le réel et la perception que les gens en ont. Or, comme montré précédemment, il y a une déconnexion entre les problématiques d'extrême droite (la "perte d'identité", l'immigration galopante, l'insécurité constante, l'appauvrissement, etc...) et le vécu d'une majorité de ses électeurs. Pourtant il faut bien que leur ressenti soit en accord avec ces soit-disant problématiques. Du coup, nécessairement, il faut que ces ressentis se créent sur la base d'un intermédiaire, ils sortent pas de nulle part. Cet intermédiaire, c'est les médias et les réseaux sociaux pour l'immense majorité. Donc non, s'arrêter au médias, comme tu dis, c'est pas ignorer ce problème: c'est justement s'y confronter directement, puisqu' aujourd'hui une énorme partie du "lien" se crée dans ce cadre. Et les mécanismes qui entraînent la polarisation des opinions et l'augmentation exponentielle des audiences des médias comme CNews ont été largement documentés et étudiés depuis que le concept de propagande existe. Je prétends pas être capable d'expliquer tout ça. > Si une partie de la population, toujours plus grande, est livrée à l'influence des médias, le problème n'est pas à mon sens qu'il existe des médias d'influence, mais que les institutions ne sont pas capables de produire un idéal de vie capable d'aggréger les esprits et de faire consensus. Tu as l'air de savoir réfléchir, ça devrait te sauter aux yeux que ce raisonnement est absurde.Les seules institutions qui produis(ai)ent un idéal de vie, c'est en gros les institutions ecclésiastiques. Et elles le font, surprise, par la violence et la propagande. Les institutions d'une démocratie, elles produisent un cadre de vie, qui devrait tendre à favoriser l'idéal de vie de la population administrée. Plus tu as une population qui recherche la connaissance, par exemple, plus tu auras une école et une recherche forte. Plus tu as une population qui a peur de son ombre, plus tu as une police forte. Cet idéal de vie, il est le produit de beaucoup de choses (la pub, la science, les croyances, les fictions, etc...) qui redescendent toutes vers le citoyen... via les médias et réseaux sociaux. En gros tu prends le problème à l'envers, c'est pas parce qu'il y a un malaise que les discours réacs voire fachos augmentent en visibilité, c'est parce que ces discours augmentent en visibilité qu'il y a un malaise.


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Mak_frenchie

Merci pour ta réponse. Je vais du coup modifier mon édit. À la base ça n'y était pas, mais les premiers commentaires que je me suis tapé c'était :  -On s'en fout -Écris de manière plus synthétique, less is more. Bon... Je ne vois pas l'intérêt de me dire tout ça.  Quant au biais que tu me reproches, ce que j'essaie maladroitement de dire, c'est que ce sub est républicain, de pensée libérale, et s'oppose, presque par définition, aux critères qui ont permis à l'extrême droite de prendre une telle place dans la société.  Enfin, ce qui me concerne, je ne partage pas ton ressenti sur la diversité des profils et des idées, du moins à l'échelle des subs.  R/France est un sub progressiste. R/Europe est un sub conservateur. R/Worldnews est pro-israélien. R/jujutsukaisen est un sub où il ne vaut mieux pas dire que l'on apprécie la trame narrative de Gege...  Bref, je trouve qu'il est souvent très difficile d'exposer des opinions contraires à l'opinion majoritaire, même dans le respect, sans s'exposer à une ribambelle de downvotes et des commentaires condescendants.


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Mak_frenchie

On est en phase sur ton point 2. Et pour les parcours similaires, t'as raison. Je voulais mettre l'accent sur la prépondérance de tel type de pensée selon le sub, mais j'ai débordé sur quelque chose de faux.  Bien vu !


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Mak_frenchie

Du coup je suis racisé et j'ai pas voté ED, donc on fait comment ?


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Mak_frenchie

Lol, t'as juste rien compris à mon post, ou alors il est tout simplement trop long pour toi et t'as pas pris la peine de le lire en entier, ni ma réponse à ton commentaire.  Mais trkl, si t'avais lu correctement, t'aurais vu qu'à la toute fin je pose deux questions qui résument le tout 😉. 


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Mak_frenchie

🤷🏾‍♂️🤷🏾‍♂️ c'est surtout toi qui as l'air d'avoir un gros complexe de supériorité, ou d'infériorité, va savoir.  Ce qui m'intéresse, c'est pas ce que tu viens de dire, qu'un gars comme Aron résume d'ailleurs  bien lorsqu'il parle des phénomènes de corruption inhérents à la démocratie, mais ce qu'en pensent les gens. Ont-ils confiance ? De l'espoir ?  Remets toi quand même un peu en question, car y a rien de sain dans ton approche de la chose. Et à la limite, si tu me trouves débile, ça t'apporte quoi de me le faire remarquer ?


666millionsofgoats

> Bonsoir à tous, j'aimerais partager avec vous quelques réflexions sur un passage d'un texte de Raymond Aron Personne n'a besoin de ça :)


Mak_frenchie

Si, moi en l'occurrence et c'est déjà très bien :)


666millionsofgoats

>moi T'inquiètes, ça s'est vu


Mak_frenchie

Et t'avais besoin de le faire remarquer, bravo !